Une pièce radiophonique avec 5 acteurs, un bruiteur, et beaucoup de désir. Le travail autour de Looking for Lulu s’approfondit au micro, avec cette exploration de la pièce de Wedekind l’Éveil du printemps. Ou comment les voix, les silences, les sons et les respirations, se conjuguent et suffisent pour créer un précipité de frustrations.

La visite de ce texte mystérieux nous questionne sur les rapports de pouvoir.

Plus nous plongeons, plus nous nous enfonçons, plus nous nous perdons… nous, notre âme, notre amitié.

La sororité de Claire et Solange y perdra-t-elle sa peau ?

Et la nôtre ?

Fruit de la collaboration entre la metteuse en scène Natascha Rudolf et Sabrina Bus, Looking for Lulu est l’adaptation de la pièce de Frank Wedekind La boite de Pandore une tragédie-monstre. Ce texte qui a inspiré le fameux film de Pabst Loulou avec Louise Brooks nous a donné envie de déboulonner le poncif enfermant de la femme, forcément séduisante et dangereuse. Fatale, donc. Nous, nous nous sommes concentrées sur l’intime : la trajectoire insensée de cette fille, Lulu, et de son entourage proche. Ils sont lancés comme un train à toute vapeur sur des rails incertains ; ils jouent un jeu dangereux, un jeu de manipulation en famille. Une femme, donc, comme un animal de foire. Pères, frère, maris, amants la convoitent, se l’approprient et veulent la posséder… jusqu’au grotesque, jusqu’au bouffon, jusqu’au tragique… Mais elle a pour elle une incroyable force de vie !

Un road movie autour du désir, une action qui jamais ne ralentit, une tension dramatique et sexuelle qui monte en puissance. Et quand la mort vient, violente, c’est plutôt par la main de ceux que l’on côtoie, que par celle d’un Jack L’Eventreur, total inconnu.

Lulu évolue dans cette société comme un poisson dans l’eau… d’un bocal. La liberté, comme une brèche, l’attire : Lulu tourne autour et s’en approche. Mais jamais n’en trouve le chemin.

Dans un geste farouche, en pleine classe, Inu coupe sa longue tresse de cheveux noirs, la brandit… et prend la fuite ! Mais pourquoi ? Elle court vers ce pays où il existe une infinité de mots pour évoquer la neige, le pays où vit La Vieille du Bout du Monde : Inu a une question vitale à lui poser.

Mais plutôt que La Vieille du Bout du Monde, c’est Grantanu qui surgit sur sa route ! Malheur à elle ! À la traîne, Plongeon rame derrière Inu. Il la poursuit depuis la salle de classe. Il veut garder pour lui cette tresse : corde pour s’évader et nid pour ses futurs bébés…

Mais sur sa route, plutôt qu’Inu, c’est Phoque qui surgit ! Chamane inuite, inspirée et inspirante, pont entre les vivants et les morts, les hommes et les femmes, les Humains et les Animaux, Phoque joue, plonge, plane, tricote avec la mythologie inuite… élargit les perspectives de Plongeon et Inu, et les nôtres !

Inu finira-t-elle pas trouver La Vieille du Bout du Monde ? Plongeon finira-t-il pas retrouver Inu ? Une aventure jonchée de mésaventures… jusqu’à l’émancipation, jusqu’à la liberté qui n’en finit pas de se gagner.

Le projet est né de la lecture du texte Nonoche, dialogues comiques de Irène Némirovsky : un texte follement frais et plein d’humour. Deux copines, vaguement cocottes, vaguement actrices, battent le pavé parisien. Elles ne sont pas au fait des conventions sociales, et pour trouver leur place dans la société, ruent dans les brancards, tombent à côté, font tout de travers, mais n’en sont jamais gênées. Leur appétit de la vie, leur élan, emporte toujours le morceau.

Nous avons souhaité garder de ce texte les thèmes si frais de l’audace, de la légèreté et de la liberté. Et les faire résonner dans notre 21 e siècle. Dans un univers singulier dans lequel les personnages, en prise directe avec leurs sensations, jouent du décalage, du détournement, du déplacement. Leurs relations sont tellement directes et spontanées qu’elles créent de l’inattendu. Nous avons travaillé à partir d’un corpus de textes qui outre Némirovsky, intègre La Vagabonde de Colette, Ulysse de Joyce, Une femme de Annie Ernaux, et Otte de Louise Bourgeois. La dramaturgie non linéaire crée un effet de liberté porteuse de légèreté et de poésie.

Dans cet univers burlesque, les échappées tragiques nous font sentir en contre-point le poids, parfois si lourd, de notre humanité.